Comment élaborer une stratégie ?

Comment élaborer une stratégie ?

Auteur : Les processus stratégiques, comment les organisations élaborent leurs stratégies Coordonné par Thomas Durand et Sakura Shimada

Le collectif coordonné par Thomas Durand et Sakura Shimada invite à considérer les stratégies d’entreprise comme des processus complexes et dynamiques.

Accord vs Airbnb dans le monde du hospitality business, création du groupe Safran à partir de la fusion entre Snecma et Sagem, joint-ventures, évolutions technologiques, etc. Autant de configurations dans lesquelles des sociétés sont amenées à élaborer des réponses stratégiques. Le collectif coordonné par Thomas Durand, spécialiste de management stratégique au Conservatoire nationale des arts et métiers (CNAM) et SakuraShimada, spécialiste de sciences de gestion au CNAM, envisage la question d’un point de vue pratique. « Il est classique de distinguer deux approches de la stratégie d’entreprise, celle relative aux contenus de la stratégie et celle consacrée aux processus stratégiques », explique Thomas Durand. « Les contenus de la stratégie disent la stratégie adoptée. C’est le royaume de l’analyse stratégique, avec sa batterie de concepts, de cadres d’analyse et d’outils : la segmentation stratégique, les facteurs clés de succès, les barrières à l’entrée, les stratégies génériques, les stratégies de portefeuille, les manœuvres stratégiques… » Les processus stratégiques se situent en amont, au niveau structurel : comment une organisation génère sa stratégie, qu’est-ce qu’elle identifie comme stratégique, comment elle fait remonter les signaux, décide et apprend de son action. Les dix-huit contributeurs de cet ouvrage prennent leurs distances par rapport à une représentation linéaire de la séquence du processus stratégique (un avant, un pendant et un après la décision). Ils mettent en avant les « multiples boucles de rétroaction et les itérations » et rappellent que « la théorie de la décision a depuis longtemps montré qu’il n’y a pas, à proprement parler, un moment de la prise de décision, mais qu’il s’agit plutôt d’un processus qui peut s’étaler dans le temps ». Un processus dans le processus, en quelque sorte, doublé de la complexité des écosystèmes où se prend la décision.

En resituant la stratégie dans sa boucle de construction, ils font apparaître sa dimension de « cadre de cohérence, avec la définition d’un cadre pour le futur », malgré les difficultés, mais aussi son caractère dynamique, lié à l’action, à l’acquisition de connaissances et de compétences nouvelles, à la construction de « représentations stratégiques » qui font à leur tour évoluer le cadre de cohérence. Ils situent également leur réflexion dans « un cadre conceptuel structuré autour de deux pôles en tension : l’inertie endogène et la proactivité endogène des organisations », et s’appuient sur les théories de la compétence organisationnelle (réception des données, information, connaissance et expertise), de la structuration (travaux de Giddens sur la dialectique signification/domination/légitimation), et de l’autopoïèse (travaux de Maturana et Varela sur l’organisme vivant capable de s’autorégénérer de l’intérieur et sur l’auto-organisation). En combinant ces outils d’analyse, ils font émerger plusieurs notions clef : compétences organisationnelles, répertoires, représentations stratégiques, conversations stratégiques, contraintes, zone de confort, inertie endogène, capacité de prises d’initiatives, etproactivité endogène.

Approche pluridisciplinaire

Le livre s’organise en trois parties. La première traite de l’inertie endogène. Philippe Very, professeur à l’EDHEC, souligne les enjeux post-fusion entre entreprises, avec le choc des répertoires organisationnels, les réflexes construits par l’expérience, et plaide pour une organisation apprenante. Hadrien Coutant, chercheur associé au Centre de sociologie des organisations de Sciences Po, insiste sur l’aspect sociologique et idéologique de l’intégration d’un groupe, à partir de l’exemple de la fusion Snecma-Sagem pour créer Safran, en mobilisant une culture d’ingénieurs. Thomas Durand s’intéresse aux questions soulevées par les projets de joint-ventures au niveau du business model, du business plan, et de la place des subjectivités et des intérêts. Le journaliste Olivier Cachin aborde le problème des évolutions technologiques à travers la révolution digitale dans le domaine de la musique, passé de la cassette au streaming.Alain Bauer, professeur de criminologie au CNAM, s’intéresse, face à la problématique du terrorisme internationale, à la mue des services de renseignement. Quant à Frédéric Garcias, spécialiste de stratégie, il rappelle, exemple du nucléaire à l’appui, que les organisations oublient et que les répertoires peuvent se détériorer.

La seconde partie est consacrée à la proactivité endogène. Georges Blanc, d’HEC, souligne l’agilité acquise par une organisation qui se reconfigure en permanence et où l’initiative peut naître d’un alignement stratégique entre structure, environnement, systèmes de management, stratégie et culture. Thibaud Brière, spécialiste des organisationspost-managériales, s’intéresse à un groupe décentralisé, fonctionnant avec un réseau auto-organisé et solidaire, considéré comme une équipe d’intrapreneurs, pour penser le concept de discernement (éthique, managérial et stratégique). Olivier Basso, du CNAM, se penche sur le rôle du dirigeant qui propose un cadre et un cap et permet l’expression des possibles. Lucie Puech, spécialiste de gouvernance et de contrôle organisationnel, s’intéresse à la manière dont l’initiative stratégique desintrapreneursse construit en fonction de la ressource temps. Brice Dattée, spécialiste de management stratégique, évoque la mobilisation de partenaires extérieurs par des intrapreneurs pour convaincre leur propre management en créant un écosystème d’innovation, avec une vision simultanée. Raphaël Maucuer, de l’ESSCA, étudie le partenariat entre multinationale et ONG, et la réinvention du business model qui s’ensuit. Fabien Gargam, spécialiste de management, se penche sur le dévoiement de la proactivité endogène, à travers le cas du dopage, pour montrer comment on peut chercher des avantages concurrentiels par tous les moyens, y compris déloyaux ou criminels.

La dernière partie propose des mises en perspectives. Hervé Laroche, de l’ESCP, interroge les pathologies de la décision stratégique, soit en les faisant dévier, soit en les paralysant, soit au contraire par la démesure ou le suivisme. Christelle Théron, spécialiste de stratégie, rappelle l’importance des managers de proximité, attentifs aux ressources et capables de routiniser la stratégie. SakyraShimada, elle, analyse la transmission intergénérationnelle comme moyen de stabiliser et de renouveler les répertoires. Enfin Benjamin Taupin, du CNAM, rappelle, à l’aune descritical management studies, les ressorts de la domination, l’asymétrie de pouvoir et la hiérarchie dans la façon de normer les processus, et pointe autant les dangers de l’hypercentralisation, que ceux du data drivenmanagement et du « management par le fun ».

Un ouvrage aux articles cours et très précis, avec une abondante bibliographie, qui passionnera un public averti.

 

Par Kenza Sefrioui

Les processus stratégiques, comment les organisations élaborent leurs stratégies

Coordonné par Thomas Durand et Sakura Shimada

Éditions EMS, Regards sur la pratique, 208 p., 280 DH


Penser la « conduite des conduites »

Penser la « conduite des conduites »

Auteur : Christian Laval

Le sociologue français Christian Laval revient sur les travaux de Foucault et Bourdieu pour repenser, à partir de leurs écrits sur le néolibéralisme, la manière de construire un objet de recherche.

Ils ont tous deux marqué la deuxième moitié du XXème siècle. Michel Foucault (1926-1984) et Pierre Bourdieu (1930-2002) ont l’un et l’autre travaillé, à quelques années d’écart, sur le concept de néolibéralisme, sans presque jamais se citer. Le sociologue Christian Laval, professeur à l’Université Paris Ouest Nanterre La Défense, ancien membre du conseil scientifique d’ATTAC, est l’auteur d’ouvrages remarqués sur la généalogie de la représentation néolibérale (L’homme économique, essai sur les racines du néolibéralisme, Gallimard, 2007 puis La nouvelle raison du monde, essai sur la société néolibérale, avec Pierre Dardot, La Découverte, 2009). Il se penche dans son dernier livre sur les démarches parallèles du philosophe et du sociologue, pour éclairer la genèse du néolibéralisme comme objet de recherche et point de départ d’une théorie politique. Dans le contexte actuel en effet, explique l’auteur, comparer les travaux de Foucault et de Bourdieu « n’est pas une entreprise dénuée d’intentions politiques » : face au caractère dominant de cette idéologie, il est nécessaire de penser une nouvelle politique.

Christian Laval balaie d’emblée l’idée que Foucault et Bourdieu s’opposeraient quant au néolibéralisme – l’un étant perçu comme  son « apologiste » tandis que l’autre incarne « la figure de l’intellectuel antinéolibéral ». Plus que des désaccords, son livre, exigeant et précis, retrace les nuances de deux pensées non contemporaines face au « surgissement historique de l’événement néolibéral », avec leurs dispositifs explicatifs, leur méthodologie et leurs résistances. Ni match, ni rencontre, encore moins « dialogue fictif qui n’a pas eu lieu », c’est le mouvement de deux pensées et de deux recherches nées de deux immenses intellectuels presque contemporains que retrace Christian Laval. Un mouvement caractérisé pour l’un et l’autre par l’inachèvement.

Un même objet, deux moments

En se demandant « comment ils en ont fait un objet de recherche, comment ils l’ont pensé sous des angles particuliers, à des moments différents, selon une méthode, dans des contextes et avec des outils théoriques spécifiques », il souligne une même démarche : comprendre le fait politique, les types de pouvoir et de domination. Le livre est construit en deux parties, qui se répondent, l’une consacrée à Foucault et la seconde à Bourdieu. Dans chacune, Christian Laval met à jour l’arsenal conceptuel déployé, insiste sur le contexte et la réception du phénomène néolibéral et montre qu’« une théorie, c’est tout à la fois une hypothèse, une polémique, une méthode, une investigation dont il vaut mieux connaître la logique avant usage ».

La principale différence entre les approches de Foucault et de Bourdieu tient au fait qu’elles se situent à une décennie d’écart. Foucault y travaille de 1975 à 1980, Bourdieu de 1980 à 2002 : « Une décennie cruciale sur le plan historique, puisque c’est alors que s’est consolidée et universalisée la norme néolibérale qui continue de régir les pratiques managériales des entreprises comme les politiques publiques. » Malgré leurs parcours parallèles (École normale supérieure, agrégation de philosophie, Collège de France, leur « double rapport complexe à Sartre et au structuralisme » et à la tradition épistémologique), leur engagement critique du Parti communisme, leur esprit rebelle et leur exigence intellectuelle joignant, dans l’un et dans l’autre « le chercheur et l’acteur politique, l’homme de réflexion et l’homme en colère », leurs démarches ne se recouvraient pas : si Foucault étendait le champ de la philosophie, Bourdieu s’en était éloigner pour consolider celui de la sociologie. « L’un est l’homme des circulations de savoirs, des « branchements extérieurs » contre le monopole des sciences officielles, l’autre celui d’un champs scientifique toujours menacé qu’il faut défendre contre les hétéronomies. »Pour Foucault, primait la notion de relationde pouvoir, avec ses mouvements stratégiques et ses opérations tactiques ; pour Bourdieu celle de rapport de domination,  prenant la mesure « des pesanteurs des structures objectives et subjectives. » Christian Laval souligne la créativité de la pensée de Foucault, face à la stabilité théorique et conceptuelle de Bourdieu, et leurs différences épistémologiques sur la vérité du phénomène (vérité d’un moment historique pour Foucault, vs « erreur théorique logée au cœur de la science économique, reposant sur une abstraction mal fondée et qui s’est transformée finalement en un projet politique de domination mondiale des oligarchies économiques et politiques » pour Bourdieu).

Or le néolibéralisme, qui est « à la fois type de gouvernementalité et mode de domination », a incité l’un et l’autre à le penser à la fois sur l’échelle micro et sur l’échelle macro, comme une « conduite des conduites ». Si Foucault y voyait un « jeu de « l’action sur l’action » » et pensait la marge de liberté dans toute relation de pouvoir pour orienter la conduite de l’autre ou résister à la conduite des conduites qu’on veut lui imposer, Bourdieu s’est vivement opposé à cette « nouvelle période de la domination sociale des classes supérieures » qui ne se réduisait pas seulement à une « extension de la marchandisation » ni à un retrait de l’État, mais à un nouveau mode de façonnage des subjectivités et du rôle de l’État.Si Bourdieu pense à une époque où les sciences sociales ont pris le pas sur la philosophie, tous deux se rejoignent sur la question de « l’historicité de l’homme économique » : le néolibéralisme est « une accélération de la construction politique des hommes économiques ». Ils insistent tous deux sur la nécessité de repenser la critique de l’ordre existant : pour Bourdieu, il faut créer des lieux critiques, pour Foucault, inventer des « pratiques utopiques ».

S’il regrette qu’aujourd’hui « leurs analyses sont insuffisantes » et sont isolées des autres formes de critique sociale et politique, Christian Laval salue dans Foucault comme dans Bourdieu deux figures de « l’intellectuel critique transversal dont le travail savant spécialisé doit permettre de dégager les règles générales d’une société à travers des études localisées dans le temps historique et l’espace social. »

 

Par : Kenza Sefrioui

 

Foucault, Bourdieu et la question néolibérale

Christian Laval

La Découverte, 270 p., 270 DH


Les jeunes marginalisés: perspectives pour les jeunes dans les pays arabes de la Méditerranée

Les jeunes marginalisés: perspectives pour les jeunes dans les pays arabes de la Méditerranée

Les soulèvements arabes de 2011 ont fait place à une large prolifération d'études sur la situation des pays arabes de la Méditerranée et, en particulier, sur les jeunes, dont le rôle était particulièrement important. Sept ans plus tard, il reste à explorer en profondeur dans quelles conditions des millions de personnes - principalement des jeunes - ont demandé un changement. Dans ce contexte, le numéro 118 du CIDOB Journal of Afers Internationals examine, à partir d'une analyse de données quantitatives et qualitatives originales, l'état et la diversité des formes de marginalisati


Innover, robotiser… Notre avenir en dépend

Dans ce monde en pleine mutation, la perspective technologique ne peut être laissée en reste  dans les politiques et les stratégies de développement. A travers nos différentes institutions scientifiques et économiques, on commence depuis quelque temps déjà, à évoquer la nécessité d’efforts plus soutenus  au profit de la recherche scientifique. On met un peu  plus fréquemment l’accent sur la recherche développement dans le monde de l’entreprenariat. On essaie aussi de plaider pour des relations plus fortes et organisées entre le monde académique et les entreprises.

Pour une automatisation au service de l’humain

Pour une automatisation au service de l’humain

Auteur : Nicholas Carr, traduit de l’anglais (États-Unis) par Édouard Jacquemont

Nicholas Carr tire la sonnette d’alarme sur les transformations du travail et de la société induites par une automatisation grandissante.

Il est loin, l’automate qui amusait par sa capacité à résoudre de basiques problèmes mathématiques. Pas d’inquiétude alors, à l’humain, les tâches intellectuelles complexes, et à la machine les tâches répétitives. L’essor des algorithmes a bouleversé la situation. Aujourd’hui, les programmes automatisés sont capables d’effectuer des opérations d’une grande complexité. Le rapport entre l’humain et la machine en est profondément transformé et, avec lui, se posent de nouvelles questions sur le monde du travail et sur les rapports sociaux. Nicholas Carr, éditorialiste américain et spécialiste des technologies, mène depuis plusieurs années une réflexion sur ce sujet. Son précédent ouvrage, The Shallows : What the Internet is Doing to Our Brains (traduit en français sous le titre d’Internet rend-il bête ? Réapprendre à lire et à penser dans un monde fragmenté, chez Robert Laffont, 2011), lui a valu d’être finaliste du prix Pulitzer 2011 dans la catégorie Essais. Dans Remplacer l’humain, critique de l’automatisation de la société, il se penche sur le prix social et humain de notre dépendance accrue aux systèmes automatisés.Ce « remplacement de l’humain » renvoie moins au fantasme d’envahissement par les machines et à la peur du chômage de masse – qui est rapidement évoqué. Comme l’indique le titre original de l’ouvrage, The Glass Cage : Automation and Us, le sujet central du livre est l’abrutissement par algorithme, l’amoindrissement des compétences humaines face à leur puissance, l’enfermement dans une prison invisible et consentie.

Un faux sentiment de liberté

C’est en effet à un renversement considérable qu’on assiste. La machine était jusqu’alors censée assister l’humain dans des travaux déterminés, le soulager de tâches pénibles ou répétitives. L’essor de la robotique et de l’informatique a imposé des systèmes automatisés dans tous les domaines et pour des usages permanents, autant professionnels que privés : objets connectés, drones, GPS, applications diverses et variées.Face à cette généralisation censée nous faciliter la vie, Nicholas Carr cite l’historien des technologies George Dyson, qui s’inquiétait déjà en 2008 :« Et si le prix à payer des machines qui pensent était des gens qui ne pensent pas ? » Sans remettre en cause la nécessité de créer de nouveaux outils pour améliorer la vie, ni être un nostalgique des lavoirs et des moissons à la faux, Nicholas Carr estime que ces progrès n’en sont que si leurs conséquences sont bien comprises et maîtrisées. Or justement, la multiplication des systèmes automatisés est selon lui insuffisamment questionnée sous l’angle du besoin réel que ceux-ci viennent satisfaire. Il s’inquiète du « faux sentiment de liberté » qu’ils procurent et d’un aspect pernicieux qui, sous couvert de facilitation, nous prive d’une expérience nécessaire au développement et au maintien de nos capacités.

Nicholas Carr s’appuie sur de nombreux exemples : conduite routière, aviation. Dans ces domaines où l’enjeu majeur est la sécurité, plusieurs accidents graves auraient pu être évités si l’on ne s’en était pas autant remis aux systèmes de pilotage automatique. En 2013, l’Agence fédérale de l’aviation américaine donne pour consigne aux pilotes de « passer en mode manuel si la situation de vol le permet » : « Après avoir réuni de nombreux éléments émanant d’enquêtes sur des catastrophes aériennes, de rapports d’incidents et d’études menées à l’intérieur des cockpits, l’agence en avait tiré la conclusion que les pilotes étaient devenus trop dépendants à l’égard du système de pilotage automatique qui équipe les avions. » Une dépendance qui devient rapidement synonyme de désapprentissage faute de pratique suffisante. En droit, en finances, en médecine, en architecture, dans l’enseignement…, le risque est de trop se reposer sur la machine, donc de relâcher ses capacités de concentration et de coordination. En médecine, où la relation humaine est centrale, le médecin, occupé à renseigner son programme informatique, passe moins de temps à parler au patient et à l’ausculter de façon empirique. Sans parler des surcoûts induits par des fonctions d’aide à la décision qui suggèrent des actes complémentaires et les facturent.

Nicholas Carr n’aborde pas tant ici la question essentielle de la collecte des données et de la dépendance aux fabricants de ces systèmes – même s’il évoque les risques liés à la surveillance et à la manipulation, ainsi que la marchandisation des relations humaines –, que la perte de compétence pour l’humain. Son argument central est qu’on ne peut dissocier le travail manuel du travail intellectuel. « Tout travail est par nature intellectuel », explique-t-il : la notion de cognition incarnée permet de comprendre « l’importance de notre rapport au monde sensible » : « En phase avec l’espace environnant, le corps et le cerveau sont capables d’intégrer rapidement des artefacts aux processus de réflexion, c’est-à-dire de les traiter comme faisant partie de nous d’un point de vue neurologique. » On apprend en faisant, en développant et en entretenant nos capacités psychomotrices. Or « l’automatisation de nos fonctions cognitives (comme la résolution d’un problème) empêche notre esprit de transformer une information en connaissance puis en savoir-faire », s’inquiète-t-il. « Loin de nous avoir ouvert de nouvelles perspectives, l’informatique a fortement réduit notre capacité d’action et de réflexion en nous imposant des tâches routinières et monotones ». Une cage de verre qui vide le travail de son sens et de son intérêt, limite nos horizons et nos choix personnels, reconfigure l’ensemble des relations humaines et sociales. « Des services publics aux liens amicaux et familiaux, la société se reconfigure pour s’adapter à la nouvelle infrastructure numérique. »Une infrastructure qui est le reflet de l’hégémonie du modèle marchand, entendant appliquer ses normes de productivité standardisées à tous les domaines, en gommant les points d’achoppement qui fondent justement l’humain, sous couvert qu’il serait dépassé. Or, conclut Nicholas Carr, « aboutir aux mêmes résultats que le cerveau humain n’a rien à voir avec l’acte de penser ». Il existe des systèmes automatisés qui augmentent notre compréhension du monde. Il est grand temps de s’y intéresser.

 

Par Kenza Sefrioui

 

Remplacer l’humain, critique de l’automatisation de la société

Nicholas Carr, traduit de l’anglais (États-Unis) par Édouard Jacquemont

Éditions L’Échappée, 272 p., 19 € / 250 DH


Entretien avec Selma Mhaoud : Champions nationaux au Maroc

Entretien avec Selma Mhaoud : Champions nationaux au Maroc

Dans l'émission Radio Médi1 " entretien de la mi-journée" Selma Mhaoud, ancienne journaliste d'investigation au Maroc, aujourd'hui analyste en risque intégrité à Londres, parle de son ouvrage publié aux éditions en toutes lettres " les champions nationaux l'équation du développement au Maroc" et à la collection Les Presses de l'Université Citoyenne dirigée par Driss Ksikes. Le but de cette collection créée par la Fondation HEM et de rendre&nbsp


Partenariat Lydec-HEM Research Center

Partenariat Lydec-HEM Research Center

L'article de l'économiste paru le 02 juillet 2018 parle de la signature d'une convention de  partenariat entre Lydec et Economia, HEM Research Center qui a eu lieu le jeudi 28 juin 2018. 

L’objectif de ce partenariat vise à entreprendre des actions communes dans le domaine de l’innovation sociale, permettant de développer des passerelles entre les deux organismes et contribuant à développer des solutions au profit du développement durable du Grand Casablanca.


Au Maroc, le grand malaise des couches moyennes

Au Maroc, le grand malaise des couches moyennes

L'article de Médias24 du mercredi 27 juin 2018 parle de l'étude réalisée par Economia, HEM Research Center ( ex Cesem) en 2009 sur la classe moyenne.

Pour lire l'article : https://www.medias24.com/MAROC/ECONOMIE/ECONOMIE/184147-Au-Maroc-le-grand-malaise-des-couches-moyennes.html


Synthèse de l’étude de la CGEM: L’informel d’après le patronat marocain

Auteur : CGEM

Le  rapport de la CGEM  sur l’économie informelle  coïncidait  initialement avec un programme de coopération  internationale .Celui- ci mettait en relation d’une part le patronat et les syndicats danois, d’autre part  la CGEM et les quatre syndicats marocains les plus représentatifs (UMT-UNTM-CDT-UGTM). Les résultats devaient être rendus publics simultanément dès la fin 2016,  et ambitionnaient d’être le point de départ d’une plateforme nationale  sur la question très importante et particulièrement sensible  de l’économie informelle au Maroc,  impliquant tous les partenaires sociaux,  dans le cadre du dialogue social.

L’informel, au-delà des  rituels

 Par souci d’équilibre la question de l’informel avait  été placée dans ce programme en étroite relation avec l’impératif du travail décent,  référence désormais incontournable  pour  le BIT et la communauté internationale,  dans le traitement de l’économie informelle.  Ce Choix  est assez compliqué  dans le cas marocain, car avec des  préoccupations divergentes au niveau des principales parties  y a-t-il potentiellement la possibilité d’un terrain  pour une quelconque convergence ? Aujourd’hui,  le pays affronte un paradoxe, les centrales syndicales marocaines mettent en exergue la détérioration réelle et continue des conditions et relations de travail au Maroc  dans le secteur organisé. Le patronat marocain pour sa part estime que « des fleurons de l’industrie marocaine disparaissent du paysage, faute de rentabilité et de compétitivité ou à cause de la concurrence déloyale et consécutive de l’informel ». Autre Fait inquiétant sous jacent, «  de plus en plus d’entreprises  glissent du secteur formel vers l’informel ».Avec ces deux préoccupations théoriquement différentes, il fallait trouver des points de rencontre pour rendre possible un dialogue et des négociations. Cela n(a pas eu lieu. Par contre, le défi  lancé par ce programme de coopération a eu peut être pour conséquence de réussir  une meilleure conscience des enjeux du travail et de l’entreprise au Maroc pour les deux principaux acteurs du monde salarial.

Les syndicats ont présenté leur étude réalisée par une équipe d’experts marocains  dès l’été 2016 ; la CGEM a présenté la sienne un an après séparément  .Rendue publique en automne 2017, elle comporte les principaux éléments rapportés dans cette synthèse. Elle a été  menée suite à un appel à manifestation d’Intérêt auquel  sept  cabinets de Conseil ont soumissionné. Le Cabinet Roland Berger fut sélectionné pour sa réalisation sous la supervision d’un comité de pilotage représentant les principaux secteurs de la CGEM et ses Commissions concernées par l’informel.

Révélations partielles de l’étude

L’étude s’est déroulée en trois phases. Dans un premier temps, elle s’est penchée sur la caractérisation du secteur informel et ses impacts sur la compétitivité des entreprises marocaines. Dans un deuxième temps, un benchmark a été mené avec des pays ayant suivi une stratégie réussie d'intégration du secteur informel.

Enfin, la dernière phase de l’étude consistait à proposer des mesures et solutions concrètes et applicables pour accompagner et intégrer les acteurs du secteur informel. Ces propositions de mesures ont été partagées avec les principales parties prenantes : HCP, Direction Générale des Impôts, Administration des Douanes et Impôts Indirects, Bank Al Maghrib, le Ministère de l’Industrie, de l’Investissement, du Commerce et de l’Economie Numérique et le Ministère de l’Intérieur

Le document rendu public  par la CGEM s’intéresse en réalité à la seule question de l’impact du secteur informel sur la compétitivité des entreprises relevant de l’économie organisée,  et donc déjà dès la question  de la définition se trouve en porte à faux par rapport à définition du HCP ou de l’OIT.

L’étude affirme  avoir fondé ses conclusions sur des entretiens impliquant toutes les parties prenantes dont notamment «une  Enquête terrain ciblée auprès de plus de 100 acteurs de l'Informel, positionnés sur différents maillons de la chaîne de valeur et issus de différents secteurs (Commerce, Textile, Cuir, Agro-alimentaire, BTP, Transports et Logistiques, Equipements électroniques, Réparation Automobile, …) »

L’étude évoque ensuite l’économie informelle comme étant la manifestation de trois cercles de production différents : activités exercées par des UPI réalisant une production marchande hors du secteur primaire, activités productives qui génèrent des biens et des services interdits par la loi ou ne bénéficiant pas d’autorisations requises (contrebande, contrefaçon, ..), Activités productives et légales mais délibérément soustraites à la loi (travail au noir, sous facturation, ..)

Une juteuse recette fiscale ratée par l’Etat !

Cette économie constituerait selon les auteurs de l’étude à un manque à gagner pour la recette fiscale de 30 milliards de dirhams, d’une valeur ajoutée de 140 MMDH, correspondant à  un PIB de 170 MMDH soit 21% du PIB national hors secteur primaire.

En termes d’importations  elle correspondrait à 40 MMDH d’importations soit 10 % environ du volume global des importations marocaines sur l’année 2014.

L’économie informelle impacte le secteur du commerce et de réparation constituant 63% de ses activités, plus de la moitié du secteur textile et cuir (54%) ; quasiment le tiers des activités du BTP et des transports le quart des activités industrielles de l’agroalimentaire,…

Côté emploi, le total des populations occupées en 2014 était de 10 632 000 , la répartition des actifs occupés hors secteur primaire fait qu’ils étaient 6 432 000 actifs  dont 2.659 000 dans l’informel  soit 41% du total des occupés. Si l’on croit cette analyse, cette masse de travailleurs se répartit entre 90 % travaillant dans des unités de productions informelles, 8% travaille dans le noir (emploi non déclaré par les employeurs) et 2% ont des activités de contrebande.

Autre caractéristique, les emplois liés aux Unités de Production Informelles sont salariés à 17% seulement en moyenne le reste c’est soit du travail non rémunéré ou de l’auto emploi.

Mais le rapport tend à vouloir surtout mobiliser l’Etat  lui décrivant  l’ampleur des recettes auxquelles il renonce en termes de manque à gagner. Il s’agit de pas moins de 34 milliards deDH  ainsi que de  4 milliards de cotisations sociales potentielles, dont  28 milliards de TVA , 4 milliards d’IS et 2 milliards de droits de douanes..Ceci représentait au cours de la même année 2014, la bagatelle de 16% de la recette effective réalisée par l’Etat auprès des contribuables.

 

Le gap de compétitivité prix des produits et services

 L’analyse présente aussi ce qu’elle a qualifié de « gap de compétitivité prix » entre secteur organisé et économie informelle et ce,  autour de quatre grilles de diagnostic : celle des UPI avec 40 pts de différence, de la contrebande avec 20pts, la sous facturation à l’import 15 pts  et la non déclaration des salariés avec 7 pts.

On retiendra dans cette analyse l’impact négatif de l’économie informelle sur le développement de l'économie formelle dans son ensemble, un fait tout à fait authentique et inquiétant pour les opérateurs  à travers  les effets catastrophiques sur l’évolution de structure du tissu industriel et sur la taille critique difficilement atteignable limitant l'amélioration de la productivité.

Il s’agit aussi « d’une perte de rentabilité limitant l'investissement, l'innovation et la capacité des acteurs de l'économie formelle à s’adresser de nouveaux marchés ».

Le benchmark de cette étude a pris le Chili et la Turquie comme référence de bonnes pratiques  à travers les différents états de l’informel, on peut citer à ce propos pour les UPI chiliennes la décision importante d'offres financières appropriées accompagnant la transition vers le formel, l’allégement de la fiscalité sur l'emploi (réduction de la part patronale aux cotisations sociales pour un CDI , un Plan anti-corruption dans les administrations publiques. Le résultat aura été la réduction en 10 ans de 10% de cette économie dans le pays. Pour la Turquie on notera l’instauration d’un régime de Subventions pour la création d'entreprise ; la réduction du taux de TVA dans plusieurs secteurs d'activités, le renforcement du système d'audit des entreprises et un plan national de lutte contre la corruption. Le résultat en Turquie aura été la réduction de 20 % de cette économie au profit d’une meilleure organisation de l’économie et une nette amélioration de la productivité et de la compétitivité des produits dans ce pays.

Remettre la question de la flexibilité sur le tapis

Une troisième grille de mesures fut introduite dans ce benchmark en vue de réintroduire un rêve très cher aux promoteurs de la CGEM, celui de remettre sur le tapis la question de la flexibilité de l’emploi, cette grille présente des exemples telle l’introduction du contrat de travail saisonnier comme alternative à l'emploi informel (Bulgarie), la flexibilisation du contrat de travail (Slovaquie)….

On peut relever dans ces deux cas l’élaboration d’une grande politique dans  trois directions, une solution courageuse envers  problème du financement des petites et moyennes entreprises et de l’auto emploi, une lutte conséquente contre les formes de corruption notamment au niveau de l’administration publique, et le développement des pratiques de coordination et d’audit à travers les différents niveaux .

La logique adoptée par le comité de pilotage de cette étude a donné lieu à la proposition d’un plan d’action pour traiter la question de l’économie informelle , s'articulant  autour de 4 chantiers prioritaires et 2 leviers transverses ; concernant les premiers , on retiendra l’appel à l’allégement de la fiscalité sur le travail et les outils de production, la simplification de  la TVA, l’accompagnement des UPI vers le Formel à travers un appui à l'accès au marché et le renforcement de leurs capacités et l’établissement de référentiels en matière de prix ou de prestations en coordination avec les professionnels.

Pour la partie des leviers transverses on relèvera l’accent mis sur la formation à travers le e-Learning ; la mise à disposition d’outils comptables simplifiés et la digitalisation et la numérisation des services publics.


Le questionnaire en questions

Le questionnaire en questions

Auteur : Jamal Khalil en collaboration avec Abdellah Zouhairi

Cet ouvrage est un retour d’expérience pas très habituel ; ses auteurs ont pris l’initiative de le faire, pour le plaisir et à l’avantage des chercheurs des sciences humaines au Maroc ,  toutes générations confondues. Il s’agit  d’une pertinente réflexion de la part de praticiens qui ont travaillé sur le terrain des enquêtes pendant plusieurs décennies. Ses deux auteurs  sont des sociologues reconnus  de l’université Hassan II de Casablanca ; en collaboration avec Abdellah Zouhairi, Jamal Khalil également directeur du Laboratoire de recherche sur les différenciations sociales et les identités sexuelles(LADSIS) de cette université, a réalisé ce travail édité par cette entité   dans la collection Recherche.

Paru en décembre 2017, ce tour d’horizon  relatif à la pratique du questionnaire entend apporter une connaissance de celui-ci  en tant qu’outil d’enquête  au profit de toutes les personnes qui voudraient en faire usage afin de produire des données statistiques en relation avec leur activité académique et de recherche.

Des questions pour des réponses porteuses de sens

En termes d’introduction, Jamal Khalil présente  succinctement  l’usage du questionnaire comme outil de recherche et ses principaux utilisateurs au Maroc. Il  rappelle  ensuite qu’avant d’entamer celui-ci, le chercheur a besoin d’abord de définir «sa problématique », laquelle ressemble à un programme établi au départ, mais doit rester ouverte à des changements apportés par le parcours ». Il s’agira  aussi de dresser des hypothèses de recherche liés à la problématique ;  des hypothèses clairs permettant le passage à la vérification empirique. « La grille du questionnaire correspond pour le sociologue à la page blanche de l’écrivain, « qu’est ce que je vais bien poser comme question pour stimuler des réponses porteuses de sens ? ». L’auteur met en garde déjà à ce stade, contre certains  risques de confusion ou d’amalgame   que les questions d’un questionnaire pourraient comporter, notamment lorsqu’il s’agit  « de profils ».Il insiste sur le fait que  Lorsqu’on pose des questions à quelqu’un « c’est à un moment, un lieu, un contexte précis », l’identification d’un individu devrait être toujours perçue comme « un instantané, jamais comme une image fixe et pérenne ». De même, produire des données vraies est une condition pour la réussite du processus de questionnement, or cela ne peut se faire sans la relation de confiance entre « l’enquêteur et l’enquêté ».Enfin  la forme des hypothèses doit permettre aux concepts utilisés de « devenir des variables observables et mesurables » par le questionnaire. D’ailleurs, ces modalités des variables concernent le plus souvent  des catégories d’action ou de perception tels que les comportements ; les attitudes et les représentations. L’auteur met aussi l’accent sur une certaine éthique de la recherche et de l’enquête qui doit être prise en compte. Dès  l’introduction de cet ouvrage, l’auteur  souligne  qu’il n’existe aucune procédure prédéfinie pour passer d’un thème de recherche à un questionnaire permettant de le traiter sur le terrain de l’enquête. Il n’y a pas d’application pour la fabrication d’un questionnaire, celle-ci se fait par un aller retour régulier  entre un terrain et un chercheur et on continue d’apprendre, à ce propos, tout au long de la vie de chercheur.

Les paradoxes intrinsèques du questionnement

Philosophiquement  les questions pourraient être une manière de réduire les incertitudes, mais les réponses contribuent souvent à les amplifier ; la conception d’un questionnaire demeure ainsi un travail qui se situe entre celui de l’artisan et de l’artiste. C’est ce qui justifie du point de vue de l’auteur l’opportunité de  cet ouvrage, dont toutes les thématiques proviennent d’enquêtes menées, à terme ou pas au Maroc, et   dont le but est de fournir une réflexion sur le questionnement. L’auteur s’engage à travers les pages de ce travail dans le processus de poser les questions en les groupant, et de les décomposer en les dégroupant selon les thématiques suivantes : les déterminants, la préhension du monde quotidien, les relations, la vie à deux et ses sens et en fin la vision du monde ; un déroulement ou déploiement minutieux,  du plus simple et basic au plus composé et complexe.

Le premier chapitre  explore les déterminants, au nombre de 50, présentés par Jamal Khalil, ils vont de l’âge et du sexe, à la scolarité, la formation, le travail, le lieu de vie , la vie professionnelle, les sources de revenus …. Il s’agit d’éléments incontournables dans le questionnement et sont  considérés comme des variables indépendantes-malgré leurs interférences-  dont chacune  ouvre la porte à de multitude de possibilités pour poser des questions et en dégager  des réponses . 

Le second chapitre sur la préhension du monde quotidien, explique que cela revient à poser des questions simples et directes pour des réponses qui décrivent l’action et le réel qui en découle. Il s’agit entre autres facteurs des pratiques culturelles, tout comme les volets économiques et de consommation, l’hygiène, les pratiques alimentaires, la santé, la reproduction, la vie associative et politique, la religion …Bref, un inventaire de 80 paramètres se présentant avec une panoplie de situations génératrices de questions.

Un champ de relations pour rendre intelligible une société 

Au troisième chapitre ,Jamal Khalil  estime que questionner les relations revient  à approfondir  le concept de société, variant dans la forme et le fond, elles sont les lieux d’échanges faits de convivialité, de conflits et de contraintes,…21 paramètres décrivent les types de  relations avec les parents, de fratrie, avec les enfants, les relations hommes femmes ,les taches domestiques, la mixité, la relation au corps…..   Ce chapitre évoque notamment la question de l’égalité de genre et le rôle de la femme au sein de la communauté.

Au quatrième  chapitre réservé à la vie à deux, « le retour d’expériences à partir d’enquêtes et de questions sur le vie en couple montre que le mariage est loin d’être la forme unique qui lie un homme et une femme », il reste toutefois une forme centrale « dans la vie à deux dans une société normée par des codes religieux et culturels ». A travers une grille de 28 critères ou éléments, allant du sens et de la notion de couple, au modèle familial, à la sexualité, aux questions financières, aux relations sexuelles hors mariage…..l’auteur passe en revue la multitude des situations et ce qu’elles indiquent en « retour d’expérience ».

Une trilogie incontournable

Le dernier chapitre est consacré à « la vision du monde », aspect particulièrement sensible puisqu’il évoque notamment le domaine des valeurs, « le questionnement d’une majorité de pratiques peut montrer à quel point des représentations guident et orientent l’appréhension du monde … », l’auteur considère que les « valeurs et croyances qui  sous tendent les représentations peuvent être comprises à travers le langage et le discours des questions ».Ces valeurs sont réparties en 4 groupes qui se croisent : personnelles , collectives ,orientées vers le passé ,ou vers le présent et l’avenir. Mais ce chapitre s’intéresse aussi à la perception de l’autorité ainsi que celle de la mort. Ainsi, à travers 28 éléments, il explore  les enseignements  des enquêtes et expériences de recherche antérieures et ce, pour de nouveaux questionnements.

En conclusion, la situation d’enquête en sciences sociales est particulière ; elle se fait dans « une relation composite »  marquée par une ignorance relative et un pouvoir symbolique. L’interaction occasionnée par la question permet « avec plus ou moins de succès » de coproduire une connaissance ; les deux formats les plus connus pour  mener des séances de questions sont le questionnaire et l’entretien. Pour les deux le questionnement commence dès la phase de la problématique et des hypothèses, il arrive ensuite à l’étape du questionnaire ou de la grille d’entretien. L’analyse des données quantitatives ou qualitatives essaie par la suite  de répondre aux questionnements de départ. Il n’y a pas en tout cela une recette miracle prescrite au préalable, c’est l’expérience de bonnes pratiques qui guide les chercheurs, ce sont  leur place et leur savoir faire  qui prédominent.

Par  Bachir Znagui

 


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